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16 décembre 2011 5 16 /12 /décembre /2011 13:55

http://www.usinenouvelle.com/mediatheque/3/3/6/000146633_5.jpg

 

Le Heron TP soutenu par Dassault.

 

16 décembre 2011 Propos recueillis par Rémy Maucourt – L’USINE NOUVELLE

 

Le prochain achat de drones par l'armée française est au coeur d'une intense polémique. Le gouvernement et l'assemblée ont pré-sélectionné un projet de Dassault Aviation, la francisation d'un drone israélien. Mais le Sénat a refusé les crédits pour cet accord. Jean-Louis Carrère, président de la commission de la Défense du Sénat, explique les raisons de ce refus.

 

L'Usine Nouvelle - Les deux thème majeurs de ce dossier sont les besoins militaires et les implications industrielles. Vous vous opposez à Dassault sur ces deux points ?

 

Jean-Louis Carrère - Nous ne nous opposons pas à Dassault Aviation, mais au choix du ministère de la Défense. Ce choix ne prend pas du tout en compte l'avis de la commission. Pour résumer notre opinion, disons que le seul modèle qu'il ne fallait pas choisir, c'est le Heron TP (Ndlr : précisément celui favorisé par le ministre Gérard Longuet).

 

Nous avons réalisé un travail sérieux, les trois vice-présidents ont interrogé tous les experts, ont visité tous les sites industriels. Et en plein mois de juillet, la décision est tombée : le Heron TP israélien a été sélectionné. Exactement celui qu'il fallait écarter.

 

Pourquoi ?

 

Pour plusieurs raisons. Il est environ 30% moins performant que le modèle américain de General Electrics, et au minimum 20% plus cher. Il y a 109 millions d'euros d'écart entre les deux offres, ces chiffres dépassent l'entendement. De plus, la "francisation" évoquée de ce modèle est très difficile à chiffrer, il devrait au final coûter encore plus cher.

 

Mais surtout, quand on regarde la destination de ces drones, on est frappés par le fait qu'ils n'ont pas été conçu pour répondre à nos besoins. Le Heron TP a été prévu pour surveiller le territoire israélien, avec des vols de courtes distances. Il est grand comme un Boeing 737, et très lourd à déployer. Il n'a pas été prévu pour supporter de l'armement. Clairement, il ne correspond pas aux besoins de l'armée française.

 

Je rappelle que la France a signé les accords de Lancaster, qui prévoient une répartition claire des rôles pour ce type d'équipement. BAE devait se voir confier la maîtrise du drone MALE de 3e génération, et Dassault celle de l'UCAV. Aujourd'hui on ne comprend pas pourquoi le ministre a choisi ce drone, qui n'apporte aucun avantage dans le cadre de cet accord. Le seul argument, c'est que nous ne serons pas soumis au lobbying américain.

 

Dans une interview au Figaro parue le 12 décembre, le PDG de Dassault Aviation met également en avant les transferts de technologies promis par les Israéliens...

 

Entre le drone Male et l'UCAV, il n'y a pas de continuité technologique. Ces deux avions n'ont quasiment rien en commun. Pour moi, c'est un argument fallacieux.

 

Ensuite, on ne comprend pas bien comment un marché de 7 à 20 drones (Ndlr : les besoins de l'armée française) pourrait être porteur industriellement. Il faut poursuivre notre accord avec l'Angleterre. L'Italie et le Royaume-Uni utilisent déjà des drones américains. En coordonnant nos efforts, on pourrait créer une filière européenne.

 

Vous ne croyez donc pas à une filière 100% française dans le domaine des drones ?

 

Non. La seule solution est une filière européenne. Nous voulons parier sur les accords de Lancaster. Nous avons déjà travaillé avec nos partenaires, les besoins sont similaires. Les accords industriels initiaux pourraient nourrir une filière, il y aurait une pertinence d'ensemble.

 

Je n'ai rien contre Dassault, et je ne nie pas les compétences françaises. Mais elles ne sont pas pertinentes sur ce sujet actuellement.

 

Pensez-vousque vous pouvez influer sur le choix du ministre ? Le moment est-il bien choisi ?

 

Nous nous battrons pour qu'il change d'avis, c'est une question d'intérêt général. Dans notre commission, on trouve des vices-présidents UMP et PS, et nous avons tous la même analyse. Cela a du sens. Je pense vraiment que Gérard Longuet et le gouvernement devraient regarder notre étude avec intérêt.

 

Dassault essaye de promouvoir l'idée que le Heron TP est français, en opposition avec le modèle américain de General Atomics. C'est faux. Et le Heron n'est pas interropérable avec les armées de nos alliés.

 

Nous voulons créer une filière européenne, mais en cette période de soudure, il ne faut pas faire d'erreur. Je refuse au nom de la commission d'endosser la responsabilité de ces choix. Si on ne se décide pas vite, d'ici à deux ans, nous découvrirons que nous n'avons pas de drone Male, et la facture s'alourdira.

 

Je ne veux pas être responsable de problèmes sur le terrain dûs au manque de matériel. On ne joue pas des vies humaines pour une filière industrielle hypothétique. Je ne veux pas aller voir des familles de soldat décédés, et devoir leur dire que nous n'avions pas le matériel nécessaire. Tout ça pour permettre à Dassault d'acquérir des technologies.

 

 

Pour bien comprendre l'ensemble du dossier :

 

L'interview du PDG de Dassault Aviation dans le Figaro du 12 décembre

 

La tribune de la commission de la Défense du Sénat dans le Monde du 13 décembre

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