Swedish Combat Vehicle 9040A. Photo taken by BS
15/01/2013 Par Pauline Curtet- LeFigaro.fr
Le chef d'état-major assure que son armée ne tiendrait qu'une semaine en cas d'invasion. Inquiètes du réarmement russe, des voix réclament l'adhésion du royaume à l'Otan.
L'ennemi du général Sverker Göranson, chef d'état-major de l'armée suédoise, réside dans les chiffres: il dénonce régulièrement les coupes effectuées dans le budget de la défense suédoise. Aussi, alors que des discussions démarrent sur le budget de 2014, il a voulu faire passer un message fort. Il a déclaré la semaine dernière dans un quotidien suédois qu'en cas «d'attaque limitée», la Suède «ne pourrait se défendre qu'une seule semaine» avant de tomber. Pire, il garantit qu'en cas d'attaque menée simultanément sur deux fronts, le pays ne pourrait résister. Pas même quelques jours.
La déclaration a réveillé chez les Suédois des craintes qui avaient disparu avec la fin de la guerre froide. Pressée de réagir par les médias, la ministre suédoise de la Défense, Karin Enström, s'est voulue très rassurante. Elle a rappelé que le niveau de préparation de l'armée correspondait au «niveau actuel de menace et de crédibilité d'une attaque» contre la Suède, ce dernier étant, d'après elle, inexistant. «Nos voisins ont les mêmes capacités que nous», a-t-elle ajouté.
Tradition de neutralité
Cependant, pour certains partis politiques de droite, pourtant membres de la coalition gouvernementale, ce niveau de défense ne suffit pas. Ils s'insurgent contre l'utilisation de l'armée, depuis la fin de la guerre froide, comme variable d'ajustement du budget suédois. Le service militaire obligatoire a été supprimé en 2010. En vingt-cinq ans, le nombre de bataillons combattants est passé de 116 à 7, ces derniers comptant 20.000 soldats de métier. Dans l'été 2012, le général Göranson s'en était déjà pris à la diminution des budgets alloués aux forces armées, suggérant de supprimer, dans les années à venir, une branche de la défense: marine, armée de terre ou armée de l'air.
«Je pense qu'un pays neutre devrait avoir de plus grandes ambitions. Aucun politicien ne peut écarter l'éventualité d'une offensive militaire», a lancé Allan Widman, porte-parole chargé de la défense au sein du Parti libéral, et principal critique de la ministre de la Défense, dans une interview accordée à la radio publique suédoise. C'est là l'argument majeur des personnes favorables à un renforcement de l'armée. La Suède est libre de toute alliance militaire, mis à part un pacte de solidarité informel passé avec les autres pays nordiques. En cas d'attaque, elle se retrouverait seule.
«On ne peut pas dire que le monde est sûr. Il y a un niveau grandissant d'incertitude, il suffit de regarder ce qu'il se passe en Russie», glisse Allan Widman, qui fait référence au réarmement, en cours, du géant russe. D'où l'émergence d'un débat, longtemps passé sous silence dans le pays: la Suède devrait-elle adhérer à l'Otan? De plus en plus de politiciens suédois y voient une solution pour défendre leur pays en cas d'attaque. L'armée suédoise a déjà mené, ces dernières années, des manœuvres communes avec l'organisation transatlantique. Reste à convaincre les Suédois d'enterrer toute une tradition de neutralité militaire.