April 14, 2014, Alain Ruello – LesEchos.fr
La production du missile AASM pourrait s'arrêter à la mi-2016. Pour maintenir les compétences, il faudrait qualifier cet armement sur le Mirage 2000.
Pour Safran, l’avenir de l’AASM, l’un des missiles du Rafale, se joue cette année. En 2005, lorsqu’il a fusionné avec Sagem, l’équipementier aéronautique a hérité de cet « armement air-sol modulaire » - prononcer « 2ASM » - conçu pour détruire par tout temps des cibles terrestres avec une très grande précision. Véritable bijou technologique, mais gouffre financier, l’AASM a fait ses preuves en Libye notamment. Mais depuis, le couperet de la loi de programmation militaire 2014-2019 est tombé et risque de faire perdre à la France une compétence technologique d’excellence, avertit l’industriel en sous-main.
Initialement, l’armée de l’air française avait prévu d’acheter 4.200 AASM. Pour des raisons budgétaires, la cible a été ramenée à 1.748 exemplaires, à plus de 170.000 euros pièce. Compte tenu de la cadence actuelle, un peu plus de 18 par mois, et de la quantité déjà produite, le dernier missile sortira de l’usine Sagem de Montluçon en Auvergne en mai 2016. Une centaine d’emplois sont concernés sur ce site et un peu plus en région parisienne.
Safran doit donc anticiper dès l’année prochaine d’éventuelles reconversions industrielles, d’autant que les perspectives d’exportation du Rafale en Inde et au Qatar n’apporteraient pas de gros volumes supplémentaires d’AASM. A moins qu’une solution soit trouvée pour augmenter ceux-ci. Sur le papier, c’est simple: il suffirait d’ouvrir d’autres débouchés au missile. Autrement dit, le qualifier sur d’autres avions de combat que le Rafale.
D’autres débouchés
C’est ce qui est en cours avec le F-16 de Lockheed Martin dans le cadre d’un programme Otan . Des essais sont prévus dans quelques semaines, mais le projet, mené très discrètement, n’avance pas très vite. L’autre débouché, le plus naturel, c’est le Mirage 2000, d’autant que des tests ont été conduits avec succès il y a cinq ans. Compte tenu du nombre de Mirage 2000 encore en service dans le monde ce serait une opportunité à l’exportation très intéressante pour l’AASM. Un pays au moins en a fait la demande selon nos informations, il s’agit du Pérou.
Le sujet est bien connu de la DGA, mais il se heurte à un problème de fonds: combien ? Selon l’adaptation souhaitée, la facture va de quelques dizaines de milliers à 100 ou 200 millions d’euros. Dans le cas des Mirage F1 marocains, c’est la version « light » qui a prévalue. Deuxième question épineuse : qui payerait ? Safran ? Le client export ? L’Etat ? Sans doute un cocktail des trois.
Enfin, il reste à voir si Dassault verra cela d’un très bon œil. L’avionneur français s’est opposé à ce qu’un armement aussi sophistiqué puisse être porté sur un concurrent du Rafale à l’exportation comme le F-16. En serait-il de même avec le Mirage 2000 ?
Compte tenu de l’échéancier, une décision doit être prise cette année pour rendre la filière AASM pérenne au delà du Rafale. Si une solution est trouvée, alors on peut imaginer qu’à moyen terme, Safran transférera la maîtrise d’oeuvre du missile à MBDA, qui a vocation a concentrer tous les programmes de missiles en France.
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