24 mai 2013 Par Hassan Meddah - Usinenouvelle.com
ANALYSE Le président de la République veut faire évoluer les participations de l’Etat dans les groupes de défense français et favoriser des regroupements à l’échelle européenne.
A l’occasion de son discours à l’Institut des hautes études de Défense nationale, François Hollande chef des armées, a tenu à rassurer la communauté militaro-industrielle sans cacher toutefois sa volonté d’impulser de grands changements. D’une part, le chef de l’état s’est dit en effet bien décidé à "préserver notre industrie de Défense". Pour cela, le pays maintiendra le niveau du budget de la Défense à 31,4 milliards d’euros en 2014 comme en 2012 et 2013 et également celui de l’effort en recherche et développement. Il a également affirmé qu’"aucun grand programme (Rafale, hélicoptère d’attaque Tigre et de transport NH90, sous-marins Barracuda et système Félin d’équipement du fantassin, ndlr) ne serait arrêté". Les industriels craignent toutefois une réduction du volume des commandes ou leur étalement dans le temps.
"Des champions européens"
D’autre part, le chef de l’Etat n’a pas caché son objectif de restructurer en profondeur le tissu industriel français. "Les participations de l’Etat doivent évoluer. Des alliances industrielles doivent être conclues à l’échelle européenne. (…) C’est un enjeu de compétitivité. (…) Il faut être capable sur les principaux domaines de l’industrie de défense d’avoir des champions européens. C’est déterminant", a-t-il insisté sans préciser de calendrier. A la fois actionnaire stratégique (direct ou indirect) et premier client des groupes de Défense (Dassault Aviation, DCNS, EADS, MBDA, Nexter, Safran, Thales…), l’Etat veut désormais enclencher une restructuration industrielle d’ampleur. L’exécution de cet objectif ne sera pas simple toutefois. En avril dernier, la Cour des comptes avait critiqué son action en tant qu’actionnaire des principaux groupes de défense hexagonaux. En 2010, dans un souci de rationalisation, l’Etat avait alors été incapable d’imposer un rapprochement majeur entre Thales et Safran, deux entreprises pourtant sous son contrôle. Les alliances européennes qui nécessiteront l’accord des autres Etats s’annoncent encore plus complexes à mettre en œuvre.
"Chacun veut prendre la place principale"
L’échec retentissant de la fusion entre EADS et le britannique BAE, en octobre 2012, qui aurait donné naissance au premier groupe mondial de défense et d’aéronautique, a été dû en partie au véto de la chancelière Angela Merkel qui craignait des restructurations trop brutales en Allemagne. François Hollande est bien conscient des écueils qui l’attendent, déjà dans le domaine de la coopération au niveau des Etats eux même : "Chacun veut prendre la place principale, ce qui rend difficile la solution". Toutefois, il tient à ouvrir une nouvelle étape de l’Europe de la Défense. Le contexte économique de récession pourrait être son premier atout : contraints d’optimiser leur budget de Défense, les pays européens risquent le décrochage par rapport aux autres puissances étrangères. Ainsi les dépenses militaires de la région Asie-Pacifique viennent de dépasser celles du vieux continent.