26/02/2015 Par Valérie LEROUX à bord du Porte-Avions Charles de Gaulle -Lepoint.fr (AFP)
Le porte-avions Charles de Gaulle va relever d'ici avril son pendant américain, l'USS Carl Vinson, pendant plusieurs jours dans le Golfe, une première entre les deux marines, explique à l'AFP le contre-amiral Eric Chaperon, commandant du groupe aéronaval français.
Q : Pourquoi avoir engagé cette semaine le Charles de Gaulle dans la coalition internationale contre Daech (groupe Etat islamique) en Irak, alors que 15 chasseurs français, stationnés aux Emirats arabes unis et en Jordanie, y participent déjà ?
R : Vu l'étendue du théâtre, la coalition n'a pas suffisamment d'avions (...) Cette puissance est aussi intéressante à ce stade de la campagne parce qu'on sent bien qu'aujourd'hui, Daech est en difficulté. Le porte-avions offre une réserve de puissance très flexible. Si un effort particulier devait être nécessaire (en soutien des forces irakiennes), sur Mossoul ou d'autres sites, il est l'instrument idéal. Ce n'est pas non plus qu'un outil de puissance ou une vitrine technologique, comme certains voudraient le suggérer. C'est aussi un instrument politique, un signal politique fort à l'adresse de Daech, mais aussi et peut-être surtout de nos partenaires.
Q : Vous êtes engagés aux côtés du porte-avions USS Carl Vinson. Comment les deux bâtiments coopèrent-ils au sein de la coalition ?
R : Le Carl Vinson va être relevé et c'est nous qui assurerons la permanence pendant la relève. Pour la première fois dans un dispositif américain, le rôle du porte-avions sera tenu par un porte-avions français. C'est bien la marque de la confiance qui unit les deux marines et du niveau d'interopérabilité auquel on est parvenu. Après la relève, le groupe du (porte-avions) Roosevelt se présentera. On va même réaliser des vols conjoints, c'est-à-dire qu'on aura une patrouille avec un avion français et un avion américain. Cela aussi, ça ne s'est jamais fait. On a par ailleurs une frégate britannique dans notre groupe. Là aussi, c'est la première fois qu'une frégate britannique remplace nombre pour nombre une frégate française. C'est un signe très encourageant pour la relation franco-britannique et pour la défense européenne.
Q : Quels sont les défis militaires, techniques d'une mission dans le Golfe, une région parmi les plus exposées du monde ?
R : C'est une zone compliquée pour des porte-avions. Vous avez énormément de pêcheurs, de navigation commerciale. Les plateformes pétrolières génèrent des flux d'embarcations, d'hélicoptères. On s'astreint à ne pas les survoler. Il suffit aussi de voir la carte des trafics aériens pour comprendre que la vie de nos pilotes n'est pas simple. La météo est assez capricieuse. On passe de phases sans vent, où les porte-avions sont obligés d'aller vite (afin de créer du vent sur le pont pour les avions), ce qui dans le trafic peut être très compliqué, à des phases où le vent vous amène du sable. On est aussi à proximité des côtes iraniennes, de leur zone d'entraînement. Donc, il faut éviter toute situation de méprise ou d'incompréhension.